Un amour inconditionnel

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Georges Ritchie a été l’un des premiers à raconter[1] son expérience proche de la mort, qu’il a faite vers 20 ans, alors qu’il était tombé gravement malade dans un camp militaire aux États Unis, en 1943. Son expérience, qu’il replace dans sa vie d’alors, est exceptionnellement riche. Le centre en est la rencontre avec un être de lumière et l’amour pur, qu’il reconnaît comme le Christ. Voici les passages les plus frappants à ce propos.

Tout d’abord, Georges Ritchie ne réalise pas qu’il est mort. Cette nuit-là, il était prévu qu’il voyage pour se rendre dans sa famille pour Noël, à Richmond. Fixé dans ce désir, il se lève et survole le pays dans cette direction. Puis il réalise que quelque chose ne va pas : il n’arrive pas à communiquer avec des personnes qu’il rencontre. Il réalise qu’il n’a pas de corps, et que de ce fait, il est isolé. Il retourne alors à la recherche de son corps et, après des recherches, finit par le trouver, dans la petite chambre d’hôpital militaire. Mais il est recouvert d’un drap jusqu’au-dessus de la tête, il le reconnaît à sa bague, au doigt de la main qui dépasse des couvertures. Au moment où prend finalement conscience du fait qu’il est mort, la pièce où il se trouve devient lumineuse :

« Je ne m’aperçus pas quand la lumière de la pièce commença à changer ; je pris soudain conscience qu’elle était plus brillante, beaucoup plus brillante qu’avant. Je me tournai vers la veilleuse sur la table de nuit : une petite ampoule de 15 watts ne pouvait sûrement pas fournir une telle clarté. Je regardai, stupéfait, tandis que la lumière augmentait encore, venue de nulle part, paraissant briller partout en même temps. Toutes les lampes de la section n’auraient pas pu fournir une telle luminosité ! Et toutes les lampes de l’univers pas davantage ! C’était une lumière incroyable : comme si un million de lampes à souder s’étaient embrasées en même temps. Dans mon étonnement me vint une pensée prosaïque dont l’origine était probablement une lecture de biologie à l’université : « J’ai de la chance de ne pas avoir d’yeux naturels : cette lumière m’aurait détruit la rétine en 1/10 de seconde. »

Non. Je me corrigeai : ce n’était pas la lumière.

C’était Lui.

Il était trop brillant pour qu’on puisse le regarder en face. Je voyais alors que ce n’était pas de la lumière mais un Homme qui était entré dans la pièce, ou plutôt un Homme fait de lumière, quoique cela n’ait pas paru plus concevable à mon esprit que cette incroyable intensité d’éclat qui composait sa personne.

Au moment où je m’aperçus de Sa présence, un ordre se forma de lui-même dans mon esprit : « Debout ! » Les mots venaient du dedans de moi, et cependant ils possédaient une autorité que mes pensées n’avaient jamais eue. Je me mis sur pied et, pendant que je me levais, me vint cette prodigieuse certitude : « Tu es en présence du Fils de Dieu. » (…) J’appris d’autres choses à son sujet. D’abord : Il était l’Être le plus totalement viril que j’aie jamais rencontré. S’Il était le Fils de Dieu, Son nom était Jésus. Mais… ce n’était pas le Jésus de mes livres d’instruction religieuse. Le Jésus d’avant était gentil, aimable, compréhensif, et peut-être un peu débile. Ce personnage-ci était la Puissance personnifiée, plus âgé que le temps et cependant plus actuel que quiconque.

Par-dessus tout, avec la même certitude intérieure mystérieuse, je sus que cet Homme m’aimait. Plus encore que la puissance, ce qui émanait de cette Présence était un amour inconditionnel. Un amour surprenant. Un amour situé au-delà de mes rêves les plus fous. Cet amour connaissait tout ce que j’avais fait de désagréable : les querelles avec ma belle-mère, mon caractère explosif, les rêveries érotiques que je ne pouvais contrôler, toutes mes pensées et toutes mes actions basses et égoïstes depuis le jour où j’étais né. Il m’aimait cependant et m’acceptait. »

Suit un long passage où G. Ritchie assiste aux scènes de sa vie, qui se succèdent dans une sorte de panorama vivant. Ce faisant, il constate que surgit une question : « Qu’as-tu fait de ta vie ? ». Il cherche, sans grand succès, puis il essaie de se défendre : ma vie était courte ! Puis lui vient la pensée qu’il a contracté une assurance-vie, s’il meurt, que deviendra-elle ? Il s’aperçoit alors que « la Présence » est pleine d’humour :

« Si je m’étais douté auparavant qu’il puisse y avoir une part de gaité dans la Présence proche de moi, maintenant j’en étais sûr ! La clarté paraissait vibrer et chatoyer dans une sorte de rire sanctifié. Pas un rire moqueur envers moi et ma stupidité, mais une gaité qui semblait dire qu’en dépit de toutes mes erreurs et de toutes les tragédies, la joie était encore plus durable. Extasié par ce rire, je compris que c’était moi qui jugeais aussi sévèrement les évènements qui nous entouraient. C’était moi qui les voyais insignifiants, égocentriques, sans conséquences. Une telle condamnation ne venait pas de la Gloire qui brillait autour de moi : il n’y avait là ni blâme, ni reproche, simplement de l’amour à mon égard… Remplissant le monde de Sa présence et cependant attentif à ma personne… Attendant ma réponse à la question encore pendante, dans ce souffle éblouissant :

« Qu’as-tu fait de ta vie que tu puisses me montrer ? »

J’avais déjà compris que dans mes efforts frénétiques pour formuler une réponse impressionnante, j’avais complètement raté mon objectif : Il ne me demandait pas des réalisations et des brevets. La question, comme tout ce qui venait de Lui, avait trait à l’amour : combien as-tu aimé au cours de ta vie ? As-tu aimé les autres comme je t’aime ? Totalement ? Inconditionnellement ? En recevant la question de cette manière, je compris combien il était absurde d’espérer seulement trouver une réponse dans les scènes qui se déroulaient sous nos yeux. Je ne soupçonnais pas qu’un tel amour pût exister ! Mais quelqu’un aurait dû me le dire, pensai-je avec indignation ! (…)Quoique ces pensées manifestent une pitié et une compassion égoïstes, la réponse en retour ne contenait aucun blâme, seulement cette évocation du rire divin derrière les mots : « Je te l’ai dit ! »

Mais comment ? Je voulais toujours me justifier : comment peut-Il me l’avoir dit et moi, ne pas l’avoir entendu ?

« Je te l’ai dit pas la vie que j’ai vécue. Je te l’ai dit par la mort que j’ai subie. Si tu me regardes, tu en verras davantage. »

Ritchie est guidé ensuite par la Présence qui lui montre différentes scènes avec des personnes, incarnée ou défuntes : des suicidés qui essaient désespérément de communiquer avec leurs proches sans y parvenir, et qui sont éperdus de remords, des âmes d’anciens alcooliques qui tentent de retrouver la sensation de boire, d’autres défunts qui ne parviennent pas à se détacher de leur maison, etc. Ce sont des scènes terrifiantes, d’autant plus qu’il reconnaît en lui des convoitises semblables à celle de ces êtres tellement malheureux. Et il se demande :

Est-ce que mon cœur, le centre de mon être, était attaché à des choses comme cela ? Jésus avait dit « Regarde-moi ! » alors que nous poursuivions cet extraordinaire voyage. Quand je le faisais, chaque fois que je le regardais, la terreur disparaissait… mais les questions redoutables demeuraient. Sil n’avait pas été avec moi, en fait, je n’aurais pas pu supporter ce qu’Il me montrait. Aussi rapidement que la pensée, nous voyagions de ville en ville, sur une terre familière, me semblait-il, les États unis, et peut-être le Canada – que j’avais toujours connue, mis à part les milliers d’êtres désincarnés que je voyais maintenant occuper cet espace « normal ».

Il continue à décrire tout ce qu’il voit, puis poursuit :

« Toutes les visions et tous les phénomènes qui m’assaillaient n’étaient rien en comparaison de l’événement principal qui consistait simplement à aimer profondément le Personnage qui se tenait près de moi. De quelque manière que je puisse considérer les choses, Il restait le centre de mon attention. Quoi que je puisse voir d’autre, rien ne pouvait se comparer à Lui.

Il y avait encore là un phénomène qui me déconcertait : si je pouvais le voir, pourquoi pas les autres ? Il était trop brillant pour que des yeux de chair puissent le contempler ; cela, je l’avais tout de suite compris. Mais les personnes vivantes que nous croisions devaient ressentir d’une manière ou d’une autre comme la chaleur rayonne du brasier !

Et les autres, ceux qui, comme moi, n’avaient plus d’yeux physiques qui puissent être détruits, comment pouvaient-ils s’empêcher de voir l’Amour brûlant et la compassion venus au milieu d’eux ? Comment pouvaient-ils passer à côté de quelqu’un plus proche et plus brillant que le soleil de midi ?

À moins que…Pour la première fois je me demandais si quelque chose d’infiniment plus important que j’avais jamais cru ne s’était pas passé le jour où, à onze ans, je m’étais avancé vers l’autel de mon église. Était-il possible que moi, de façon réelle, je « renaisse » comme l’avait dit l’officiant, avec des yeux nouveaux, si je comprenais quelque chose à cela ?

Les autres pouvaient-ils le voir maintenant si leur attention n’était pas entièrement tournée vers le monde physique qu’ils avaient perdu ? « Là où est ton trésor, là aussi est ton cœur…[2] » Aussi longtemps que mon cœur avait été attaché d’aller à Richmond à une date déterminée, je n’avais pas non plus été en mesure de voir Jésus. Peut-être, lorsque notre principal centre d’intérêt était axé sur quelque chose d’autre, Lui barrons-nous le passage, même à lui.

Il poursuit son voyage avec l’être de lumière, il assiste à la manière dont peut se produire un phénomène de possession, puis arrive au-dessus d’une plaine très sombre, où des personnes se battent, des hordes d’êtres désincarnés, frustrés, haineux, misérables, qui s’entredéchirent ; comme un champs de bataille purement psychique. Il constate que ces personnes sont prisonnières d’habitudes de pensées et d’émotions : haine, convoitise, destruction. Il se reconnaît lui-même dans certaines de ces attitudes… mais de la Présence n’émane aucun jugement à leur égard :

« Malgré cela, il n’y avait à nouveau aucune condamnation émanant de la Présence près de moi, mais seulement de la compassion pour ces malheureuses créatures, qui lui brisaient le cœur. À l’évidence, ce n’était pas par sa volonté qu’elles se trouvaient là. (…)Peut-être n’était-ce pas Jésus qui les avait abandonnés ici, mais eux qui avaient fui la Lumière où leur obscurité était découverte ?

Puis il réalise que ces créatures ne sont, en fait pas aussi seules qu’il ne l’avait perçu tout d’abord :

Ou… étaient-ils aussi solitaires qu’il y paraissait tout d’abord ? Je me rendis compte petit à petit qu’il y avait quelque chose d’autre dans cette plaine, avec ces corps en lutte. Je l’avais senti depuis presque le début, mais pendant un long temps je n’avais pu situer le phénomène ; quand j’en pris conscience, ce fut avec un choc qui me laissa abasourdi.

Cette plaine désolée était survolée par des êtres apparemment faits de lumière. C’était leur taille même et leur lumière aveuglante qui m’avait tout d’abord empêché de les situer. Maintenant que j’avais ajusté ma vue à leur existence, je regardais ces immenses présences penchées sur les petites créatures de la plaine, conversant peut-être avec elles. Ces êtres brillants étaient-ils des anges ? La Lumière à côté de moi, était-ce aussi un ange ? Mais la pensée qui avait fait une impression si complète sur mon esprit dans la petite chambre d’hôpital avait été : Tu es en présence du Fils de Dieu. Étaient-ils des doubles d’êtres humains ? Comme moi malheureux et indignes qui se trouvaient en sa présence ? Dans un univers où l’espace et le temps ne suivaient plus de règles que je connusse, pouvait-Il se tenir près d’eux comme il se tenait près de moi ? Je n’en savais rien. Mais tout ce que je voyais clairement, c’est qu’aucune de ces créatures querelleuses n’était abandonnée : on les regardait, on les surveillait, on s’en occupait. Il était tout aussi évident qu’aucune d’entre elles ne le savait. Si Jésus ou les anges leur parlaient, elles n’entendraient sûrement pas : il n’y avait aucun relâchement dans le flot de rancœur qui s’exhalait de leur âme : leurs yeux ne cherchaient que quelqu’un de proche à humilier. (…)

En réalité, maintenant que j’étais conscient de ces présences lumineuses, je comprenais avec étonnement que je les avais toujours vues… mais sans prendre le fait en considération, comme si Jésus ne voulait me montrer à chaque instant que ce que j’étais prêt à voir. Des anges peuplaient les villes des vivants où nous étions passés : ils étaient présents dans les rues, dans les usines, dans les foyers, même dans ce bar ravagé où personne n’avait été autrement conscient de leur existence que moi-même. Et je compris soudain qu’il y avait un commun dénominateur à toutes ces scènes : c’était l’incapacité à voir Jésus. Que ce soit un appétit physique, une préoccupation terrestre, un repliement sur soi-même, tout ce qui interférait avec la venue de Sa lumière créait une séparation dans laquelle nous marchions vers la mort.

Dans la suite de son expérience, G. Ritchie voit des mondes plus paisibles, et il reçoit finalement aussi la perception fugace d’une ville de lumière radieuse. Puis il revient à lui, au total, son état de mort clinique a duré 9 minutes. Sur le plan médical, le fait qu’il ait retrouvé toutes ses facultés après un temps de mort clinique aussi long est inexplicable. Il raconte aussi la suite de sa vie, en particulier sa nostalgie immense d’avoir perdu la possibilité de ressentir la présence immédiate du Christ. Il le cherche désespérément, et finit par le retrouver dans le regard de certaines personnes qu’il rencontre.

 [1] Il la raconte au Dr Moody en 1978; celui-ci publie ensuite « La vie après la vie », premier livre à propos des expériences proches de la mort (NDE en anglais, EMI en français). Georges Ritchie raconte son expérience dans le livre paru en français sous le titre : Retour de l’au-delà, Éditions Laffont

[2] Évangile selon Matthieu 6,21 : « Ne vous amassez pas de trésors sur la terre, où les mites et les vers font tout disparaître, où les voleurs percent les murs et dérobent. Mais amassez-vous des trésors dans le ciel, où ni les mites ni les vers ne font de ravages, où les voleurs ne percent ni ne dérobent. Car là où est ton trésor, là aussi sera ton cœur ».

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